OS et religion
Du foisonnement qu'a connu l'univers de l'informatique personnelle au début
des années 80 il ne reste plus grand chose aujourd'hui et on pourrait
penser que tout est définitivement standardise. Et bien non. Comme le
disait le mathématicien a deux balles dans Jurassic Park : "Nature
always finds a way". Partons donc a la découverte du monde très
darwinien des systèmes d'exploitation et de leurs utilisateurs.
Commençons par les pires de tous, les Macqueux. Inutile d’espérer
entretenir une discussion technique fructueuse avec ces gens la. Pour le Macqueux
l'informatique s'apparente a une religion. Et comme dans toute religion, il
y a le dogme. Aucune affirmation ne doit être ni démontrée,
ni étayée. Le messie de cette secte s'appelle Steve. Mais un jour
Steve est parti. Et petit a petit l'Eglise a perdu de son pouvoir et de son
influence. Les Macqueux, qui autrefois riaient en regardant Atari et Commodore
sombrer, se sont mis a plaider pour la diversité, des larmes de crocodile
dans les yeux. Nombre d'entre eux ont quitte l'Eglise. Mais aujourd'hui tout
va bien. Steve est revenu en sauveur, irradiant de gloire et de sagesse. Accessoirement,
Steve s'est incline devant Bill, son ennemi de toujours. Mais Steve en bon gourou
a fait comprendre a ses adorateurs (au départ un peu épouvantes)
qu'il s'agissait en fait d'une grande victoire pour leur Eglise. Le Macqueux
est content. Certes, la part de marche de sa machine favorite stagne toujours.
Certes, Apple a abandonne ses produits les plus novateurs pour ressortir les
vielles recettes. Mais Steve lui a dit d'oublier tout ca, et lui a montre un
joli bilan comptable, avec un gros '+' sur la dernière ligne. Et si Steve
dit que tout va bien, alors tout va bien.
Ensuite, le Linuxien. Le Linuxien est d'un niveau intellectuel beaucoup plus
élevé que le Macqueux. Selon les spécialistes, en moyenne
trois fois plus élevée, puisque sa souris a trois boutons, alors
que celle du Macqueux n'en a qu'un. On peut discuter avec le Linuxien. Seul
problème : le Linuxien en tant qu'interlocuteur ne vaut guère
mieux qu'un vieux sénile un peu dur d'oreille. Les réponses ont
rarement un rapport avec la question.
- C'est sur, ça a l'air bien Linux. Mais moi ce dont j'ai besoin, c'est d'une suite bureautique avec un traitement de texte qui corrige a la volée, un petit système de base de données, un tableur. Je pourrais trouver ça ?
- Ah ! Quelle merde Office. ça plante tout le temps. Mais c'est pas sur Linux que ça arriverait. Parce que Linux, [SNIP 30 mn de monologue sur le multitasking, la mémoire paginée, les E/S asynchrones ...]
- Euuuh ... mais alors, pour mes applis ? On peut faire du copier coller entre un tableur et un traitement de texte ?
- Ah, OLE, quelle daube [SNIP 45 mn sur OLE, DCOM, CORBA ...]
Le Linuxien, malgré ses défauts, possédait cette rigueur intellectuelle et morale qui imposait le respect. Mais maintenant que n'importe quel lycéen peut installer une Red Hat, ces qualités survivront elles ?
Les médias se sont déjà charges de trouver un gourou aux Linuxiens, Roberto DiCosmo (official motto : "Clown Planetaire"). Grise par les flashs et les projecteurs, Roberto se balade de plateau de télé en studio de radio, semant a tout vent des affirmations peu étayées et assez souvent contradictoires et clamant haut et fort que si l'utilisateur moyen utilise Windows, c'est uniquement parce qu'il est un crétin fini. a ce rythme la, Dechavanne et Delarue nous préparent probablement déjà des émissions "spécial Linux" durant lesquelles Roberto aura amplement l'occasion de s'enfoncer un peu plus. Bref, l'avenir n'est pas tout rose.
L'Amigaiste quant a lui est un peu le "poète maudit" de l'informatique.
Sa machine, lors de sa sortie, était la reine du bal : le plus beaux
graphismes, un son à se damner, ... Mais aujourd'hui les prétendants
de la belle meurent mystérieusement les uns après les autres et
les promesses ne débouchent sur rien. Une malédiction plane sur
cette machine.
Parlons maintenant du petit dernier, le BE. Les BEs sont sous la houlette de
Jean-Louis, un ex évêque de Steve qui a décide de monter
son propre culte. De ses années chez Apple, Jean Louis a garde cette
charmante manie qui consiste a changer de stratégie tous les 6 mois.
On annonce un produit novateur comme la BeBox en fanfare, on le distribue en
petites quantités, avant de décider peu après que finalement
non, on arrête tout.
Rendons lui tout de même justice: ç’aurait été pire
s'il avait appris le métier chez Atari. Jean-Louis est surtout connu
jusqu’à présent pour ses talents de comique. Personnellement je
n'ai pas oublie son interview dans Science & Vie Micro d'Avril 84 ou il
expliquait que le Lisa n’était pas un échec commercial (cette
machine poursuit d'ailleurs aujourd'hui une superbe carrière dans la
catégorie "collector rarissime"). a ses heures perdues, Jean-Louis
exerce toujours ses talents d'entertainer pour le compte du quotidien Libération.
Les BEs prétendent être plusieurs milliers. Ils sont en effet plusieurs
milliers a écrire des programmes aussi indispensables que des démineurs
ou des lecteurs de CD, pendant qu'une infime minorité perd son temps
avec des projets susceptibles d’intéresser d’éventuels clients.
Passons aux Windowsiens. Ce sont de loin les plus nombreux, a tel point qu'on
les accuse aujourd'hui de menacer le fragile équilibre de l’écosystème
de la planète informatique. La plupart des windowsiens ne sont en fait
même pas au courant de l'existence des autres espèces.
Quelques uns ont vu un type a fort accent italien a la tele parler d'un truc appelé Linux mais ils ne sont pas très surs. Peut être que c’était la rediffusion d'un vieil épisode de Benny Hill sur Arte. Les windowsiens ne sont pas très évolués, techniquement parlant. Ils utilisent des machines très puissantes et très chères pour des choses aussi stupides que taper du texte, surfer sur le web, ou envoyer du mail. ça énerve profondément les Linuxiens qui utilisent leur machine pour l'administrer (un bel exemple de récursivité), ainsi que les Macqueux pour qui les Windowsiens sont, quoi qu'ils fassent et quoi qu'ils disent, des suppôts de Satan.
Et enfin pour terminer, l'Atariste... seul et abandonne de tous. Il y a longtemps que la maison mère lui a fait faux bon. Pire, pendant qu'il provoquait l'Amigaiste en combat singulier sur la parking du centre commercial, les Macqueux, les Linuxiens et les Windowsiens lui ont tire sa mob. L'Atariste est resigne. il n'en veut plus a personne (quoique s'ils mettaient la main sur un membre de la famille Tramiel, certains repeindraient volontiers leur séjour en rouge vif). Il aime bien son Mac quand il tourne sous MagiC. Il ne déteste pas un bon gros PC avec PacifiST. Les Ataristes forment un groupe discret et sans illusions.
Cette liste n'est certainement pas exhaustive. Qui plus est, il est fort
probable que dans l'avenir, on assiste a l'apparition de nouveaux groupes
ou a de profonds bouleversements dans les tribus existantes.